jeudi 18 octobre 2007

PORTRAIT D’ARTISTE

PORTRAIT D’ARTISTE

Ellisson Abraham (Abe) : « Exportraite-toi »

Ellisson Abraham, dit Abe, accomplit la prédiction d’Andy Warhol qui promettait à chacun de nous son quart d’heure de célébrité. Lui, invite le public à s’auto-portraiturer, annulant toute distance entre le photographe et son modèle. Il suffisait d’y penser.

Abe débusque le photographe qui est en chacun de nous.

  • La photographie a-t-elle sa place dans une expo d'art contemporain ?
  • Moi je suis un gars simple. Je ne me retrouve pas trop dans le concept d'art contemporain. Disons que ce n’est pas le genre de discours que j’emploie tous les jours… Mais si c’est pour se demander si un photographe a-t-il sa place dans une telle manifestation, bien sûr que oui. Il y a belle lurette que la photograhie n'est plus considérée comme un art mineur. Peintres ou photographes, on est tous des artistes, avec la même envie de créer. Avec chacun ses thèmes de prédilection : moi, c’est plutôt les rues, les visages, l'environnement. Je retrouve dans 30 et presque songes ce désir d'innover, de faire de nouvelles expériences, donc je me sens chez moi.
  • Tu as un rapport très original à la photographie : chez toi, ce sont les sujets qui se tirent le portrait…
  • (Rires) Ce que j'essaye de faire dans Exportraite-toi, le thème que je présente à l’expo, c’est d’amener les gens à être leur propre photographe et de les confronter ensuite à leur image sur l’écran vidéo. C’est une façon de les libérer du photographe, du rapport modèle-artiste. Ils deviennent leur propre création et peuvent avoir, ne serait-ce que pour quelques secondes, un vrai jeu d’acteur. On n’est jamais si bien servi que par soi-même.
  • Le fameux quart d’heure de célébrité promis par Wahrol... Finalement, c’est très conceptuel comme démarche…
  • Je me définis plus comme un artisan-photographe que comme un artiste. Le peintre crée tout de A à Z, des formes aux couleurs, alors que le photographe est plutôt un capteur d’ambiance. Celui qui appuie sur le bouton au bon moment, avec les bonnes personnes en face de lui.
  • Pas si facile. Encore faut-il savoir capter…
  • Il faut avoir l'instinct du bon climat qui donne la bonne photo. Et bien sûr dominer les problèmes de cadrage, de lumière. Mais pour le reste, c’est le réel qui fait tout le travail. Avec Exportraite-toi, je pousse cette logique à fond, je m’éclipse complètement derrière celui qui se photographie. Je le laisse même seul devant son image quand il la découvre, parce que c'est très intime comme expérience.
  • Y a-t-il un public pour ce genre de démarche ?
  • Je fais ce que l’on appelle de la photographie d'auteur. C'est-à-dire que j’écoute mes envies de création. Les impératifs commerciaux ne sont pas vraiment des impératifs pour moi (rires). Heureusement, il y a les expositions pour pouvoir exister et évaluer son travail.
  • Nous sommes plus une société de l’oralité que de l’image. Comment vois-tu l'évolution de la photographie à Madagascar ?
  • Je pense qu’elle entame une grande ouverture. Aujourd’hui, on voit de plus en plus de photographes de création. Je m’en réjouis, l’image est restée trop longtemps au niveau banal de la pub ou de l’actualité.Actuellement, grâce aux centres culturels et aux initiatives privées, les photographes malgaches peuvent bénéficier de contacts, entre eux comme à l’étranger, ce qui est très important. Tout cela ne peut qu’aboutir à l'émergence d’une authentique photographie malgache.
  • Pratiquer la photo artistique n’est pas toujours facile à Madagascar…
  • Il faut manger, c’est sûr. La vulgarisation des appareils photos, qui est une bonne chose en soi, rend la vie dure au photographe professionnel qui n’a pas toujours le temps et les moyens de se consacrer à son expression personnelle.
  • Ton message à ceux qui veulent te suivre ?
  • D’abord se faire plaisir et garder la passion. Mais aussi beaucoup travailler et regarder ce que font les autres pour mieux avancer. Moi, j’ai beaucoup travaillé le noir et blanc, mais aujourd’hui j’ai envie d’essayer d’autres techniques de photos. Je suis toujours en mouvement, mais c’est la moindre des choses pour un photographe du vivant.

Hernan Rivelo

Date : 21-09-2007

http://www.lexpressmada.com/index.php?p=display&id=11274

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